vendredi 13 juin 2014

Dossier 2 : Hong Kong en France Part one : Bruce Lee




Impossible d'évoquer le cinéma d'art martiaux ou de karaté sans faire un arrêt sur image sur Bruce Lee, icône du cinéma populaire mondiale et qui en l'espace de quelques films était devenu une des plus grandes légendes du cinéma. Pour beaucoup, son aura reste absolument unique, peu importe la qualité variable de ses titres, il reste un corps et une présence magnifique. Avant d'aborder en fin de dossier ses films et ses prestations, revenons sur  Bruce Lee et le rôle catalyseur qu'il a eu sur la distribution du cinéma HK en France. Sans oublier du rôle déterminant que René Château a eu sur la reconnaissance d'une star, d'une genre, d'une industrie.
 
 
 



 
 
 
Bruce Lee : La légende du petit dragon comme catalyseur de la passion HK.

En trois ans (de 1970 à 1973) et avec seulement cinq films (Big Boss de Lo Wei, La fureur de vaincre de Lo Wei, La fureur du dragon de Bruce Lee, Opération dragon de Robert Clouse et Le jeu de la mort de Robert Clouse, sortie en 1978 après rafistolage), Bruce Lee est encore aujourd’hui, l’incarnation du mythe de la Star. S’il y a un nom qui a le plus contribué à la gloire, à la renommée du cinéma de Hong Kong, c’est bien celui de Bruce Lee. Avec Marylin Monroe et James Dean, Bruce Lee demeure ainsi l’un des trois comédiens dont l’image et l’aura, restent, plus de 30 ans après sa mort, toujours intactes, vivantes[1].



Dans un article consacré à Bruce Lee, Stéphane Lacombe (Journaliste du magazine HK- Orient extrême cinéma, N°7, juin 1998 Page 52-53) explique les raisons de sa renommée, tout particulièrement en France. Outre son charisme et sa beauté, Bruce Lee est également à l’origine de l’émergence d’un nouveau genre cinématographique : le ciné-karaté. A travers, cette formulation discutable pour les puristes, Christophe Champclaux, rappelle, dans son ouvrage[2] l’origine de la technique martial de Bruce Lee qu’il nomma dans un premier temps Jun Fan Gung Fu avant de l’appeler, en 1967, sous la formulation Jeet Kune Do[3]. Comme le précise Champclaux dans son livre « ...Bruce acquiert une large connaissance d’un grand nombre de styles de combats allant du Taï Chi à la Savate en passant par la boxe anglaise et Le Muy Thaï…. ».





Autant de techniques de combats utilisées à des fins spectaculaires renforçant son impact visuel qui vont participer à la vague du ciné-karaté. Rapidement, les distributeurs étrangers, lassés par les médiocres résultats des films de Hong Kong, notamment Du sang chez les Taoïstes, le fameux Les griffes de Jade de Ho Meng Hua et La dialectique peut-elle casser des briques ?[4] (Sorties en France entre 1971 et 1972) vont s’intéresser à ce nouveau phénomène. Lorsqu’on apprend la mort brutale de Bruce Lee, le 20 juillet 1973, le cinéma d’arts martiaux est sur le point d’exploser en Occident. Pendant ce temps, l’axiome suivant « Le plus fort, c’est Bruce Lee » devient courant et les clones de Bruce Lee ne vont pas tarder à l’exploiter à fonds. A cette époque, René Château, qui lance sur le marché les films de Bruce Lee, devient le distributeur le plus important du cinéma de Hong Kong en France. Comme le précise Vincent Ostria dans son article ‘La distribution peut-elle encore casser des briques ?’ : « La mort de Bruce Lee, en 1973, fut le catalyseur du mouvement »[5]. Elle a non seulement permis de faire connaître une industrie, mais elle a lancé la mode du film d’arts martiaux en France.

Extrait d'un itw de René Château pour Starfix  N°2 Hors Série, Spécial Action

"Avant la Fureur de vaincre, je n'avais vu en fait que La main de fer qui était au Richelieu. Toujours est-il que lorsque j'ai vue Bruce Lee pour la toute première fois, j'ai été frappé par son charisme et par le fait qu'il faisait tout physiquement. Pendant certains combats, son œil devenait fou !"

Les clones de Bruce Lee :





La mort prématurée de la star Bruce Lee laisse un trou énorme dans l’industrie du cinéma de Hong Kong et les exploitants et les distributeurs essayent par tous les moyens de capitaliser le succès foudroyant du ciné-karaté. Tout le monde a conscience que sans «le petit dragon » comme détonateur, l’industrie de Hong Kong n’aurait jamais connu un succès public aussi fulgurant. Il faut donc, coûte que coûte, chercher l’acteur, le genre susceptible d’inciter les gens à se déplacer en salle. L’industrie va donc miser sur deux genres cinématographiques issue de cette situation de crise : «La Kung Fu comedy » (dominés par les chorégraphes acteurs Jackie Chan, Samo Hung et Yuen Biao) et «le Fake-Bruce-Lee-Flick » (Les clones de Bruce Lee)[1].

 
Intéressons-nous, tout d’abord, à ce sous genre aussi rapide qu’éphémère qu’a été les clones de Bruce Lee. Malgré la mort de Bruce Lee en 1973, la mode reste au film de Karaté et au film de Kung Fu, et les distributeurs vont, de manières évidemment opportunistes et mercantiles, exploiter le mythe de Bruce Lee pour le compte de quelques producteurs qui sentent le précieux filon. Très rapidement à Hong Kong, la frénésie touche le grand public et la presse à scandale. Christophe Champclaux[2] rappelle cette période : « La presse à scandale tient là sa vengeance contre un homme célèbre pour ses nombreux accrochages avec les paparazzis. Il suffira de déclarations évasives des médecins et de quelques ragots de concierges de voisins mal intentionnés, pour que les esprits en mal de scandales s’échauffent. Betty Ting Pei n’est pas la dernière à laisser planer de lourdes ambiguïtés. En quelques manchettes agressives, l’idole des foules devint un psychopathe hystérique, un accro à la drogue doublée d’un obsédé sexuel, victime des Ninjas, de Raymond Chow, des moines Shaolin, voire des mauvais esprits. Aux yeux du public, une simple maladie neurologique provoquée par le surmenage ne peut évidemment pas suffire à expliquer un tel décès ». Plus loin, il ajouta encore : « Comme pour Elvis, on prétendit même que sa mort n’était qu’un coup de pub, et qu’il allait revenir »[3]. Bien entendu, face à cette profusion d’informations déformées ou construites, il est facile pour des hommes peu scrupuleux d’abuser le public en lui proposant des films marqués par le sceaux Bruce L.. (Peu importe son orthographe, le public n’est pas censé faire la différence avant d’avoir vu le film).

 
 
Suite la semaine prochaine

Pour patienter, voici la section bonus avec les ouvrages existants sur Bruce Lee






Bonus Vidéo Documentaire et Reportage
 
 
 
 

 
 




[1] Dans l’entretien de Libération du 23 juillet 2003, Christophe Gans évoque le ‘culte du regret : « C’est très perturbant, un référent érotique, romantique et morbide. Pour l’éternité ! J’insiste sur cet aspect des choses : la morbidité, presque la nécrophilie, qui a poussé les adolescents du monde entier à lui vouer ce culte du regret ».
[2] Tigres et Dragon : Les arts martiaux au cinéma, de Tokyo à Hong Kong. Edition Trédaniel, page 26-28.
[3] Il existe deux ouvrages publiés après la mort de Bruce Lee, en fait un ensemble de texte, ou la star explique l’origine de cette technique et de ces emprunts : Le Tao du Jeet Kune Do (publié en 1975) et Commentaires sur la voie martiale (publié en 1997).
[4] La dialectique peut-elle casser des briques ? est un film du mouvement situationiste qui a détourné un film de Hong Kong de manière comique afin d’introduire un discours communiste.
[5] Cahiers du Cinéma. N°362-363, septembre 1984 : Hors série, Hong Kong Cinéma, page 115.
(6) 99 films en tout. Ce chiffre comprend l’exploitation salle et vidéo. Il est à prendre avec quelques précautions, il peut, en effet, être un peu plus important. C’est donc une estimation.

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